40 • Rumeur

Elles courent, elles courent, faisant relais et réseau, pour le seul plaisir de raconter, de fabriquer l'étrange, d'agrandir la réalité. Au Québec, contes et légendes ont filé leurs «rumeurs» jusqu'à donner un profil singulier à notre imaginaire. Le Sabord avait le désir ce printemps de questionner la rumeur moderne, assise de nouveaux mythes, de réveiller la rumeur littéraire, de faire courir les plumes et les langues autour de l'anecdote. Les auteurs qui ont accepté d'être complices? Louis Hamelin, Jean-Claude Germain, Jean-Pierre April, André Carpentier, Bernard Pozier, Louis Jacob, Michel Dufour et Linda Bonin. Certains disent les bruits confus de l'être, d'autres cheminent dans notre propre espace littéraire/mythique.

La rédaction recevait, alors qu'elle travaillait à la préparation de ce numéro sur la rumeur, une lettre surprenante, de main anonyme. Aucune adresse de retour sur l'enveloppe, aucun cachet de la poste, aucun indice pouvant conduire à l'identité de son auteur. Nous avons jugé approprié de publier cette lettre, véritable «code du rumoriste». Et nous cherchons toujours à retracer l'origine de l'envoi...

Du côté des arts visuels, la rumeur se construit dans le dialogue espace-objet, faisant écho au passage de l'humain. Ainsi nous sommes interpellés par les œuvres de François Morelli (page couverture), de Lynda Baril, d'Aline Beaudoin et de Jeane Fabb, dont l'œuvre famine et festin a été réalisée pour l'exposition Hyperboles organisée par le Centre d'exposition de Mont-Laurier.

Au moment d'écrire ces lignes, au début de mai, le monde des arts était stupéfait d'apprendre le décès accidentel de l'artiste Pierre Ayot, fondateur de l'atelier et de la galerie GRAFF. Nous aurions souhaité qu'il s'agisse d'une rumeur, mais la réalité aura su, comme l'art de Pierre Ayot, déjouer le prévisible et le banal et secouer notre conscience.